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jeudi 14 mai 2015

Commentaire d’Arrêt de la Cour Suprême de Canada. General Motors vs Kravitz ,1979

Commentaire d’Arrêt de la Cour Suprême de Canada.  General Motors vs Kravitz ,1979


Olivier Kasso Etudiant en Master 1 de droit


C’est un arrêt de la Cour suprême  de  Canada  rendu en  1979   qui porte sur les limites  à la liberté contractuelle, notamment les vices cachés.
En espèce,  General Motors Produits of Canada Ltd v. Kravitz' ont l'avantage d'être très simples et classiques. Kravitz à acheter du concessionnaire Plamondon une automobile neuve fabrique par General Motors. Le contrat comporte la clause habituelle de garantie des vices caches: réparation ou remplacement aux frais du manufacturier et exclusion de tout autre recours contre le concessionnaire et le manufacturier. Le véhicule se relève atteint de défauts cachés, que le juge de première instance estimera assez sérieux pour justifier la résolution de la vente. Par un jugement unanime de la Cour suprême, qui manifeste d'ailleurs son intention d'en faire une décision de principe pour la protection du consommateur, Kravitz obtient, solidairement contre General Motors et le concessionnaire Plamondon, la restitution du prix ainsi que des dommages-intérêt.
En ce qui concerne les motifs de la décision, le sous-acquéreur est fondé à exercer ses recours non seulement contre son vendeur mais également contre le manufacturier parce que la garantie des vices, due par celui-ci au concessionnaire, lui a été transmise par le seul effet de la loi. Par ailleurs, le manufacturier et le concessionnaire, étant présumés  connaitre les vices, ne sont pas admis à invoquer la clause limitative et doivent donc subir la résolution et les dommages-intérêts en vertu de la garantie légale des vices cachés.

La  question est de savoir ici  si un sous-acquéreur peut-il poursuivre directement un ancien propriétaire, autre que celui avec qui il a conclu une vente? La réponse est aujourd’hui évidente : un sous-acquéreur peut poursuivre un manufacturier ou un ancien propriétaire pour vice caché, même s’il n’a pas de contrat avec lui. Néanmoins, il est intéressant de retourner en arrière pour retracer l’histoire de cette avancée en droit. L’objectif de ce billet est de faire un lien entre cette évolution et le droit immobilier
Cette question soulève trois difficultés,  Cela soulève trois difficultés principales: la première résulte de la stipulation de non-garantie; la deuxième a trait à l’effet de la garantie conventionnelle de G.M.; la troisième provient du fait que Kravitz prétend invoquer un droit résultant d’un contrat auquel il n’est pas partie.

I)                   Stipulation de non garantie
La clause de non-garantie contenue dans le contrat de vente entre Plamondon et Kravitz vise à écarter la garantie légale des défauts du concessionnaire et du manufacturier. Même si nos tribunaux admettent plus facilement que les tribunaux français la validité des clauses de non-responsabilité, il n’y a pas de raison d’adopter une solution différente de celle consacrée par la jurisprudence française lorsqu’il s’agit de la vente d’un produit neuf par un vendeur professionnel à un acheteur d’occasion. Le vendeur professionnel tout comme le fabricant a l’obligation de dénoncer les vices cachés de la chose qu’ils vendent. Alors que de nos jours la vente est fréquemment un contrat d’adhésion, il apparaît important de ne pas permettre qu’un fabricant ou un vendeur professionnel puisse ignorer systématiquement la garantie des vices cachés ou en restreindre les effets au détriment de l’acheteur occasionnel. Cette solution, déjà adoptée par les tribunaux du Québec, est d’ailleurs conforme à l’arrêt majoritaire de cette Cour dans Touchette c. Pizzagalli, [1938] R.C.S. 433. La stipulation de non-garantie ne peut donc pas faire obstacle au recours de Kravitz contre G.M

II)                l’effet de la garantie conventionnelle de G.M
Lorsque Kravitz a pris possession de l’automobile, Plamondon, agissant comme mandataire de G.M., lui a remis deux livrets publiés par G.M. et dont certaines clauses constituent une garantie conventionnelle consentie par G.M. Par cette garantie, G.M. veut supprimer sa garantie légale comme celle de son concessionnaire et limiter l’étendue de sa responsabilité. En vertu du principe déjà démontré selon lequel un fabricant ou un vendeur professionnel ne peut écarter la garantie légale des vices cachés ou limiter la responsabilité qui en découle, il faut tenir pour non écrite toute disposition de la garantie conventionnelle qui aurait pour effet de dégager G.M. de sa responsabilité en vertu de la garantie légale. La garantie conventionnelle ne peut donc être invoquée à l’encontre du recours de Kravitz contre G.M

III)             invocation par Kravitz d’un droit qui en principe lui est étranger

Pour décider du bien-fondé du recours direct de Kravitz contre G.M., il faut déterminer si la garantie légale des vices cachés résultant de la vente entre G.M. et Plamondon a effet seulement entre les parties immédiates du contrat ou si elle peut également bénéficier à un acquéreur subséquent de la chose vendue. A l’appui de sa prétention que l’intimé ne peut invoquer un droit qui résulte d’un contrat auquel il n’est pas partie, l’appelante cite l’art. 1023 C.c.selon lequel un contrat n’a d’effet qu’entre les parties contractantes. Mais la règle énoncée à cet article n’est pas absolue, car elle est sujette à des exceptions (art. 1028 à 1031 C.c.) qui posent des règles différentes selon qu’il s’agit d’un droit ou d’une obligation. Si en général un contrat ne lie que les parties contractantes, l’on semble par contre avoir toujours reconnu qu’il est des droits qui se rattachent si étroitement à une chose qu’ils ne peuvent bénéficier qu’au propriétaire de cette chose. A la lumière de ce principe de la transmission des droits qui s’identifient avec la chose ou en constituent l’accessoire, il faut dire que la garantie des vices cachés est due, non pas seulement à l’acquéreur immédiat, mais également à tout acquéreur subséquent de la chose. Le sous-acquéreur peut donc agir directement contre le premier vendeur tant en résiliation qu’en dommages. Mais la résiliation dont il s’agit est celle de la première vente puisque c’est elle qui donne naissance à la garantie dont se prévaut le sous-acquéreur. Le prix que le premier vendeur doit restituer est donc celui de la première vente, c’est-à-dire celui qu’il a reçu. Quant à la différence entre le prix de la première vente (prix de gros) et le prix de la deuxième vente (prix de détail), elle est comprise dans les dommages-intérêts dus aux termes de l’art. 1527 C.c. En l’espèce, même si Kravitz ne demande expressément que la résiliation de la vente qui lui a été consentie par Plamondon, ses conclusions prises contre G.M. impliquent nécessairement que Kravitz n’entendait pas que la vente entre G.M. et Plamondon continue d’avoir effet. D’autre part Kravitz demande que G.M. soit tenue à lui rembourser le prix qu’il a lui-même versé et la preuve n’indique pas le prix de la vente consenti par G.M. à Plamondon. Cette omission est cependant sans importance; si le prix reçu par G.M. est égal ou supérieur à celui payé à Plamondon, G.M. doit restituer le prix qu’elle a reçu; si le prix reçu par G.M. est, comme il est vraisemblable, inférieur à celui payé à Plamondon, G.M. doit payer en plus la différence entre les deux prix, à titre de dommages-intérêts. Par conséquent, G.M. doit, en vertu de la responsabilité légale des défauts cachés dont elle est débitrice, payer à Kravitz le montant du prix de vente que celui-ci a versé à Plamondon ainsi que les dommages qui sont la conséquence des vices cachés. G.M. est solidaire avec Plamondon du paiement intégral de la somme due à Kravitz, puisqu’il s’agit pour G.M. et Plamondon d’une affaire de commerce.
Comme la garantie légale des défauts cachés entraîne la responsabilité de G.M., il n’y a pas lieu de se prononcer sur les deux autres moyens invoqués par Kravitz, soit la garantie conventionnelle et la responsabilité délictuelle


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